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Flûte de Paon / Livre-sse livresque
13 avril 2020

"Quatre idiots en Syrie" de Christophe Donner

Quatre idiots en Syrie de Christophe Donner

Quatre idiots en Syrie

Résumé :

Ils sont quatre, comme les Dalton. Quatre Français, un vidéaste, un photographe et deux écrivains, invités par un improbable «  Festival du cheval  » à Damas, en Syrie. Ils sont tellement flattés d’être parmi les rares Français à pouvoir fouler le sol de cette patrie ravagée par la guerre depuis huit ans, qu’ils sont prêts à tout pour assouvir leur passion du cheval. Prêts à ce qu’on les fasse passer pour ce qu’ils ne sont pas. Prêts à rencontrer les dignitaires locaux et avaler leurs discours patriotiques d’un autre temps. Prêts aussi à se laisser corrompre par le régime  de Bachar el-Assad  et à servir d’«  idiots utiles  », comme au bon vieux temps de Staline, Mao et autres Castro  ? Là, ça coince un peu. Mais ils se croient protégés par l’ironie, par l’amour du cheval, ils ont la curiosité en guise de passeport, avec le visa inattaquable de l’impartialité. La réalité du pays va les entraîner dans un mensonge des plus loufoques au cours duquel la question se pose  : est-ce qu’on a bien fait d’aller en Syrie  ? Certainement pas… sauf si l’un des branquignols rapporte de ce voyage supposé servir la propagande du régime une sotie parfaitement incorrecte qui montre que le roi est nu…

Mon avis :

Je me suis demandé tout le long de ces 154 pages si je n’étais pas en train de lire une farce. Une bonne grosse farce d'avril. Faut dire que ce livre, qui raconte l’histoire de quatre idiots inutiles en voyage en Syrie, paraît tellement surréaliste qu’on ne peut pas avoir d’autre sentiment que celui-ci. Puisque les quatre gonzes ne sont pas seulement que quatre idiots inutiles, c’est aussi quatre personnes qu’on prend pour des imbéciles.

Mais pour bien comprendre ce que je veux dire, je replace vite fait l’ambiance. Dans une Syrie ravagée par la guerre et qui tente de reprendre vie, un salon du cheval est organisé à Damas où nos quatre français (dont l’auteur) sont invités en tant que délégation française. Jusqu’ici rien de bizarre, visiblement ils vont faire un peu de tourisme tranquillement ; mais c’était sans compter avec le mec qui leur sert de guide et qui est un espèce d’hurluberlu qui va inventer le mensonge le plus improbable du monde dans un pays qui ne déconne pas : un des invité, Jean-Louis Gouraud, est le petit-fils du général Gouraud mort sans enfant. (Je suis en train de me dire que je n’ai jamais écrit un truc aussi débile de ma vie.) Bref ! De ce mensonge, où un des personnages va devoir faire avec et les autres suivre le mouvement, va sortir des situations que personne n’auraient imaginées et un recul de la part de l’auteur assez comique. (Je vous garantis que vous allez rire en lisant le livre.) En effet, ce dernier ne manque pas de trouver la situation surréaliste, de voir les discours pour ce qu’ils sont et de rire des traductions du guide ainsi que de son comportement. Cerise sur le gâteau, l’auteur ne manque pas non plus d’autodérision et ça rajoute au charme du livre.

Mais au-delà de la situation surréaliste que vivent nos protagonistes, ce livre est aussi appréciable pour ce qu’il montre de la Syrie : un pays qui, malgré un timide retour à la vie, n’est pas prêt de se reconstruire. Surtout pas avec le zozo huluberlu de guide qui refait l’histoire du monde à sa sauce. Bien sûr ce personnage réel est drôle quand on lit ce qu’il raconte comme connerie, mais il est aussi terriblement désolant car ce n’est pas avec des gens comme ça que l’on reconstruit un pays correctement.  
Au-delà de l’affligent niveau intellectuel de l’hurluberlu et de cette Syrie pas prête de vivre et de croquer la vie à pleine dent, ce livre va aussi nous interroger sur notre vision des choses, sur nos priorités, et finalement on va se rendre compte que tout n’est que question d’impression personnelle.

En conclusion je ne peux que conseiller ce livre un peu farceur un peu triste.

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18 décembre 2019

"La petite voleuse de la soie" de José Frèches

La petite voleuse de la soie de José Frèches

Source: Externe

Résumé :

Quelques œufs de ver à soie et graines de mûrier… et voilà qu’un secret jalousement gardé en Chine pendant des millénaires finira par être divulgué au dehors de la Grande Muraille, ce qui entraînera la chute de la puissante dynastie des Han.
Nous sommes au IIIe siècle de notre ère, et la « petite voleuse de la soie » s’appelle étoile du Nord. Menacée de mort, cette brodeuse aux doigts d’or fera le bonheur d’un roitelet du Khotan et la richesse de cette oasis, l’un des plus anciens pays bouddhistes.
Sa fuite est le début d’une étourdissante cavalcade sur la légendaire route de la soie, épopée pleine de rebondissements, de fureur et de sensualité, où le lecteur croisera, tour à tour, un vieil ermite taoïste, un général sans peur ni scrupules, un empereur autiste et une redoutable Persane.
Avec ce roman, José Frèches nous fait partager sa passion pour la Chine. Il nous montre combien la soie était, pour tous les Chinois, une étoffe sacrée, symbole de beauté, de douceur, mais aussi de rayonnement et de domination.
Jusqu’à ce qu’un coup de foudre ne vienne tout renverser…

Un grand roman au cœur des mystères de la Chine.

Mon avis :

Depuis Moi, Confucius je n’ai pas lu de José Frèches aussi prenant. J’ai apprécié découvrir Gengis Khan, 2500 ans de la Chine, j’avais beaucoup moins apprécié le Père David et le Panda, avec La petite voleuse de la soie je retrouve enfin ce que j’apprécie dans le roman et chez cet auteur : une écriture prenante, un fond  historique, un soupçon énorme de connaissance.
Je suis toujours ravie d’apprendre des choses, surtout quand ça concerne des régions pour lesquelles j’ai de l’intérêt, mais pour moi l’intérêt de ce roman ne réside pas que dans son savoir - même s'il en fait indubitablement partie.

En effet, pour commencer, je salue le roman par le traitement des personnages. Ces derniers, variés et nombreux, assurent déjà à eux seuls une part importante de l’intrigue. Chacun a son caractère, ses petites ambitions, sa petite histoire, ses petites haines, qui donnent très vite du rebondissement à l’intrigue et fait que ce livre n’est pas un long fleuve tranquille. On sent que ça va dégénérer. Surtout si on ne perd pas de vue qu’à l’époque la justice peut être assez expéditive, et qu’il est facile de piéger quelque-un.
Je ne vais pas vous mentir tous les personnages ne sont pas sympathiques, bien sûr que parfois on a envie d’en tuer quelques-uns, mais à part ça rien de grave, le roman s’en chargera bien tout seul. (J’ai un sourire sadique qui se dessine sur les lèvres. Oui.)

Outre les personnages qui donnent déjà à eux seuls la substance intéressante du livre, l’autre atout de ces pages est bien évidemment l’approche de la Chine ancienne par l'auteur. A travers ce livre José Frèches qui est un grand connaisseur de la Chine, a su trouver les mots justes et l'ambiance juste pour dépayser son lecteur et le transporter dans une Chine hautaine, brillante, secouée par les révoltes, injuste par sa misère et le traitement de certains personnages. Pas une Chine toujours sympathique... Mais un vrai cours d'histoire sur fond de légende, écrit d'une écriture qui éloigne l'exotisme songeur, - quand bien même le décor et la soie qui me laissent toujours cette petite image de palais féerique chinois en tête. (On ne se refait pas.)

En conclusion, je n'écrirai pas 150 lignes pour vous dire de lire ce livre, car c'est juste un livre à lire pour découvrir un peu plus la Chine. Et ça devrait être suffisant pour vous le faire lire, acheter, offrir.

XO éditions.

6 décembre 2019

"Un peu de nuit en plein jour" d'Erik l'Homme

Un peu de nuit en plein jour d'Erik l'Homme

Source: Externe

Résumé :

"Il ne reste plus que ça aujourd’hui, la communion des caves, cette sauvagerie qui seule subsiste une fois quittée la grisaille de la surface où les clans survivent dans des boulots plus pourris qu’une charogne oubliée sur un piège."

Ce pourrait être le monde de demain. Paris est envahi par une obscurité perpétuelle et livré aux instincts redevenus primaires d’une population désormais organisée en clans. Dans ce monde urbain terriblement violent, Féral est un des derniers à avoir des souvenirs des temps anciens. Il est aussi un as de la « cogne»,
ces combats à mains nues qui opposent les plus forts des clans dans des sortes de grand-messes expiatoires. C’est lors d’une de ces cognes qu’il rencontre Livie, qui respire la liberté, l’intelligence, la force. Leur amour est immédiat, charnel, entier. Mais le destin de Féral va se fracasser sur cette jeune femme qui n’est pas libre d’aimer.

Bijou littéraire, Un peu de nuit en plein jour parle de notre monde qui s’abîme, de la part de sauvagerie en l’homme, de l’inéluctabilité des destins.

Avis rapide :

Pour une première avec l'auteur, ça n'a pas été très concluant. Ce livre n'est pas déplaisant, il se lit bien, mais il n’est pas pour autant extrêmement plaisant. L'histoire est terrible, l'ambiance dangereuse avec quelques plages de douceur qui permettent le rêve et l'épanouissement, mais le côté oppressant et violent sans trop savoir pourquoi m'a un peu perturbée. (Bien que je me doute que c'est l’humanité qui a commencé à définitivement foirer.)
Bref. Pas la lecture de l'année, malgré une écriture qui possède son charme et une fin... vous verrez.

Extrait :

"En vérité Féral pense que c'est trop tard, que les jeunes qui se sont révoltés avant eux, quand il était encore temps, se sont trompés de révolte - c'est facile d'exiger que tout change alors qu'on n'est pas prêt à changer soi-même. La couleur du ciel, ce n'est pas un problème extérieur mais une affaire intérieur. A quoi bon le soleil si les cœurs ne sont pas prêts à l'accueillir ?"

21 août 2019

"L'aile des vierges" de Laurence Peyrin

L'aile des vierges de Laurence Peyrin

Source: Externe

Résumé :

Angleterre, avril 1946. La jeune femme qui remonte l'allée de Sheperd House, majestueux manoir du Kent, a le coeur lourd. Car aujourd'hui, Maggie Fuller, jeune veuve au fort caractère, petite-fille d'une féministe, entre au service des très riches Lyon-Thorpe. Elle qui rêvait de partir en Amérique et de devenir médecin va s'installer dans une chambre de bonne.
Intégrer la petite armée de domestiques semblant vivre encore au siècle précédent n'est pas chose aisée pour cette jeune femme cultivée et émancipée. Mais Maggie va bientôt découvrir qu'elle n'est pas seule à se sentir prise au piège à Sheperd House et que, contre toute attente, son douloureux échec sera le début d'un long chemin passionnel vers la liberté.

Mon avis :

J'ai plutôt bien apprécié la première partie en Angleterre, la partie américaine devient plus fastidieuse.
Cependant, ce n'est pas tant ça le problème qui fait que je ne lui attribue que un 2/5. Non. le problème, c'est l'héroïne qui est franchement agaçante. Elle ne sait pas ce qu'elle veut, elle est obtuse, elle n'est jamais contente, ne se pose pas trop de questions non plus, et pense à tort qu'être féministe s'est foncer dans le lard de tout le monde !

Par ailleurs, je trouve cette personne trop actuelle pour être d'époque et crédible, en effet dans ce livre être féministe c'est (attention la liste est longue) : combattre pour LGBT, combattre pour les minorités, combattre contre le racisme, combattre contre la religion, combattre la faim dans le monde, et c'est être plus ouverte que les autres (forcément). C'est même se poser déjà pour l'époque, la question de féminisme égale classe privilégiée de blanche.

Enfin bref, l'héroïne se prend pour une Mère Teresa de toutes les causes, il ne lui manquait que le foulard islamique à défendre pour avoir le combo. Par ailleurs ce côté Mère Teresa qui ne pense qu'aux autres et pas à elle c'était peu crédible, à voir d'ailleurs si Mère Teresa ne pensait pas un peu à elle de temps en temps.
Bref ! Tout est excès dans ce livre. Dommage.

19 juillet 2019

"Fille du silence" de Carole Declercq

Fille du silence de Carole Declercq

Source: Externe

Résumé :

Sous le soleil de plomb sicilien, Rina a vécu une enfance pleine de violence et de non-dits dans une famille différente des autres. Une famille gangrenée par la mafia, où les hommes disparaissent parfois mystérieusement, où la plupart des femmes sont veuves ou orphelines.

Lorsque le père de Rina, le « parrain » du village, est assassiné, le monde de l’adolescente s’effondre complètement. Doit-elle vraiment se résigner et accepter son destin, comme sa mère le lui demande ? Et son frère, le seul homme encore vivant de sa famille, finira-t-il lui aussi enterré dans un terrain vague ?

Pour Rina, c'est hors de question. Alors, elle va mener sa propre vendetta. En brisant la loi du silence, elle va s’attaquer au fragile équilibre qui avait jusqu’alors cimenté son existence. Au risque de faire voler en éclats sa vie et celle de sa famille...

Avis express :

"L’odeur de la mafia, je ne vous en ai pas encore parlé. Sachez juste qu’elle est en suspens partout où vous mettez les pieds ici. Elle précède tout. Même son silence."

J'ai reçu ce livre il y a à peu près plus d'un an, j'avais tenté de le lire une première fois mais j'avais laissé tomber au bout de deux pages. J'ai repris ce livre il y a peu, et je l'ai dévoré en deux jours.
Cette histoire vraie mais romancée de Rita Atria (Rina dans le livre), fille et soeur de mafioso qui aura le courage de s'élever contre le milieu après la mort de ses parents, est racontée avec tellement de délicatesse et de lucidité, qu'il est en faite impossible de ne pas apprécier ce livre, - et ceci même si parfois on a l'impression que l'autrice poétise trop son roman.

En effet, l'auteure a tellement bien réussi l'immersion du lecteur en mettant en avant les forces contraires, le consentement, le courage de Rina, la haine de sa mère, la vengeance sous le soleil écrasant de Sicile, qu'il est impossible de ne pas s'embarquer dans cette histoire terrible, savamment mélangée et dosée avec la vie d'une jeune fille. Par ailleurs comment ne pas admirer le courage de cette jeune fille qui va défier toutes les lois que la mafia impose ?

Bref ! J'ai eu un gros coup de coeur pour ce livre. Merci madame Declercq pour cette belle et terrible histoire, juste dommage que vous n'ayez pas plus de visibilité, car ce livre la mérite bien plus qu'un Nothomb...

Editions Terra Nova.

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21 juin 2019

Avis divers

Avis divers :

Source: Externe     Source: Externe    À l'origine notre père obscur par Harchi

Mes avis :

La route sombre : Le bonheur est impossible en "communisterie" (oui j'invente des mots). La corruption, l'annihilation du passé, la monstruosité de ce régime chinois, la maltraitance du peuple, vous éclate à la gueule quand vous lisez ce livre.
Mais tant de malheur, ça fait un peu long quand même.

L'auberge de rouge : Un peu fastidieux à lire avec l'énumération des crimes ou des faux crimes. Le côté arrestation/procès, est bien plus intéressant surtout qu'il permet de mieux imaginer l'Ardèche ancienne qui garde encore aujourd'hui ce côté paumé, vieille famille, vieille querelle.
Mais au final je ne regrette pas cette lecture qui ne penche ni d'un côté ni de l'autre et soulève à la fin des bonnes questions. A lire pour voir ce qui se cache derrière la légende ardéchoise. Et moi qui pensait qu'en Ardèche il ne se passait jamais rien...

A l'origine notre père obscur : Très beau livre, avec une histoire terrible écrite d'une main poétique et imaginaire. Beaucoup de colère contre la condition de ces femmes et des pratiques archaïques qui font le jeu de la jalousie et de la haine.
Quelques beaux passages aussi. Juste un bémol, je n'arrive pas à lui coller une époque. J'ai l'impression que ce livre navigue entre les époques et les mondes. Qu'il est un portrait de femme de part le monde et le temps.

16 mai 2019

"Le sauvage" de Guillermo Arriaga

Le sauvage de Guillermo Arriaga

Source: Externe

Résumé :

Dans l’Unidad Modelo, quartier trépidant du Mexico des années 1960, la violence est une affaire de la vie quotidienne. Pour Juan Guillermo, elle est
une présence obsédante, qui l’a privé de ce qu’il avait de plus précieux : son frère aîné, Carlos, aussi habile trafiquant que fervent lecteur, assassiné par les « bons garçons », une bande de religieux fanatiques protégés par les hommes du très corruptible commandant de police Zurita. Anéantis par le chagrin, ses parents meurent à leur tour dans un accident de voiture, le laissant orphelin
à dix-sept ans. Unique survivant de sa famille, Juan Guillermo jure de se venger des assassins de son frère.
Dans cette vie nouvelle placée sous le signe de la vendetta, seul l’amour fou de Juan Guillermo pour l’intrépide Chelo pourrait l’extirper de la spirale de destruction dont il est captif.
En contrepoint de cette histoire se déploie la quête d’Amaruq, un trappeur inuit lancé dans la traque sans relâche d’un grand loup gris à travers les forêts glacées du Yukon – un périple qui le conduira dans les profondeurs de la folie et de la mort.
Ces deux récits subtilement enchevêtrés forment une fresque puissante et féroce, faisant écho aux plus belles pages de Herman Melville et Jack London.
Une épopée magistrale qui tend un miroir troublant au lecteur, en lui dévoilant comment la société réveille le loup sauvage qu’est l’homme en puissance.

Mon avis :

Je crois que c’est la première fois que je lis un auteur mexicain. Pour une première, c’est une réussite, et une sacrée belle découverte. Ce mélange de temps, d’histoire, et l’imagination étaient beaucoup trop bien maniés pour ne pas l’apprécier, malgré le fait que ça soit un gros pavé.

Nous allons donc suivre l’histoire d’un loup chassé et capturé à travers les étendues blanches et forestières du Canada, et de celle de Guillermo Juan et de sa famille au Mexique. L’histoire prépondérante est la dernière, l’histoire triste de Guillermo. Histoire triste certes, mais pas dénuée pour autant de questionnement, d’évènement, de passion, de haine, de rebondissement, de force et de courage, qui va permettre d’aborder tout un tas de sujet, dont trois principalement.

Tout d’abord la corruption. Beaucoup de corruption. Mais la corruption meurtrière, celle qui tue avant de punir par la prison. Et pour avoir refusé de verser une part de ses butins au chef de la police, c’est ce qui perdra Carlos, le frère de Guillermo.
Qui dit corruption, dit aussi collusion entre gang et pouvoir. Se battre contre l’un c’est se battre contre l’autre, c’est aussi redessiner des règles. Ce qui n’inquiète pas Guillermo qui veut venger ses morts, mais qui va cependant réveiller tout un système plus grand que lui et qui ne plaisantera pas, et cherchera vraiment à l’éliminer. N’est sauvage pas que le loup…
Enfin, ces pages c’est aussi l’occasion d’aborder la religion. La manière dont-elle est utilisée, la manière dont on peut la voir. La manière dont-elle peut se faire menaçante par l’idéologie ou par les groupes. C’est aussi aborder le fond, souvent ridicule, de fait le dieu Serpent à plume (Quetzalcoatl)  n’est pas plus ridicule que le reste.

Mais ce livre, ce n’est pas qu’un combat avec les mains ou idéologique, ce n’est pas non plus que des combats d’intérêt financier ou contre la pourriture, même si cette dernière peut avoir des apparences angéliques. C’est aussi des questionnements, des errances. Qui suis-je ? Dois-je préférer la justice à la vengeance ? Dois-je me transformer en assassin pour venger les assassins de mon frère ? Que me reste-t-il à part mes morts ?
C’est aussi en outre, un combat contre soi-même. Guillermo va vraiment s’interroger sur l’enrôlement qu’il a subit parce que son frère lui a demandé. Il va se questionner ainsi sur les actes qu’il a pu commettre et leurs conséquences. Je vous laisse imaginer dans quel état ça va le mettre. Et quand je parle de combat contre soi-même, c’est aussi admettre que les morts sont parfois sombres et loin de l’image merveilleuse qu’on avait pu en tirer.

Ce livre c’est tout ça, mais c’est aussi une histoire, enfin deux histoires qui finiront par se rejoindre. C’est donc celle de Guillermo, son enfance, sa procréation, son adolescence et l’adulte, mais aussi celle du loup qui raisonne en écho avec Croc-Blanc et Moby Dick.  Et pour cette dernière, et après un début un peu houleux - car on se demande vraiment où l’on va -, elle deviendra tout aussi passionnante que celle de Guillermo. On va y découvrir d’autres histoires tragiques (qui permettront de faire une pause dans l’histoire de Guillermo), mais très intéressantes qui vont mettre à jour d’autres paysages, d’autres histoires, d’autres personnalités, d’autres sauvages.

Juste un petit bémol, certains passages longs et pas intéressants, ceux qui parlent de sexe. Ils n'apportent rien à l'histoire, ou très très peu.

En résumé, c’est un livre long, très difficile à chroniquer tellement il est riche en situation et question, mais c’est un livre à lire. Le mélange des histoires, les analepses et les prolepses, l’écriture, les personnages, les situations, ne peuvent en effet que plaire. C’est vraiment trop bien manié, trop bien raconté, trop riche, pour ne pas aimer. Et ça serait dommage de passer à côté.

Editions Fayard.

Extraits :

"Or Carlos avait compris à la perfection que, dans le système capitaliste, la rébellion avait une valeur très cotée. Il savait la labelliser et la commercialiser, et persuader ses clients que les vrais révoltés étaient ceux qui s'aventuraient dans les univers de la morphine et LSD, loin des sentiers battus de l'herbe et de la coke." P.212

"La mère de l'assassin doit être si accablée qu'elle a trouvé le cran d'aller affronter la mère de celui que son fils a tué. Elle n'est pas venue le justifier ni demander pardon en son nom. Elle est venue partager son chagrin, serrer dans ses bras la mère qui a perdu un enfant à cause de son fils." P.393

9 mai 2019

"Peine perdue" de Kent

Peine perdue de Kent

Source: Externe

Résumé :

D'un coup, sèchement, par un simple appel, Vincent l'apprend : Karen est morte, Karen s'est tuée au volant. Singulièrement, ce qui aurait dû le démanteler sur place, l'annihiler, ne le touche qu'à peine. La mort de Karen n'ouvre pas un gouffre mais cerne les contours d'une absence : Vincent Delporte, claviériste et compositeur, amateur de Haydn, n'aimait plus sa femme, Karen, star du street art. Et c'est à l'exploration subtile, nuance après nuance, de cet état d'être que va se livrer l'auteur, tout au long de ce roman. Peine perdue, un titre qui n'aura jamais autant convenu à un livre, car Vincent va chercher en lui sa peine comme on remue le fouillis d'un tiroir, inventorie le vrac d'un grenier, à la recherche d'un objet perdu. Il n'y trouvera qu'« une mélancolie brumeuse qui, à la manière d'un doux clapot, lui lèche les rives de l'âme ». Un manque lancinant, néanmoins, qui va l'amener à remonter le cours de leurs vies, objet après souvenir, d'instant en rencontre. Au fil de la route, reprise au sein d'un groupe vedette, on le voit retisser des liens rompus, affectifs et familiaux, réactiver des liaisons anciennes, mesurant ainsi le temps écoulé, l'usure des corps et le fléchissement des âmes. Sentant qu'il a sûrement été dépossédé d'une part de lui-même par l'ascendant de sa défunte femme, il se piste, tente de refaçonner ce qui serait sa vraie personnalité. En vain. L'impasse intérieure est là, qui ne donne que sur l'absence. Le coeur n'est pas un objet en consigne, à retrouver intact, c'est un muscle qu'on a tort de laisser fondre. Et le retendre ne sera que peine perdue : une lente déploration romanesque et désenchantée sur le temps et l'usure sournoise des amours.

Mon avis :

Peine perdue de Kent, parle d’un homme qui n’a aucune peine à la mort de sa femme Karen, et donc d’un homme qui aurait tendance à rendre responsable la défunte de ce qu’il est devenu. Au vu du résumé et avec un peu d’imagination, on pourrait penser que l’on aurait affaire à un psychopathe, surtout que ce livre m’a été proposé dans le cadre des Explorateurs du polar. Eh ben, gros épic fail pour bibi, ce n’est en rien un polar, c’est juste un livre contemporain. De fait, vous pensez bien, que j’ai été un peu déçue en voyant que ça n’était pas ce que j’imaginais.
Certes on pourrait penser que cela n’empêche en rien d’apprécier un livre, et c’est vrai puisque j’ai apprécié moyennement cette lecture. Toutefois j’avoue que ça a joué un peu dessus, mais outre cette petite déception, j’ai aussi moyennement accroché à cette lecture car c’était long. Oui ! Le roman n’a beau pas être épais, je vous jure que j’ai trouvé cette lecture longue. J’ai trouvé que ça tournait un peu vite en rond, que ce n’était pas toujours intéressant, et j’ai senti très vite que cette froideur apparente, ce rejet de la moitié, cachait finalement des sentiments profonds pour l’épouse défunte. Bien sûr, l’auteur aborde la vie de ce personnage par son métier, il n’aborde donc pas que les sentiments et les accusations de Vincent envers sa femme, il a pris soin de placer ce dernier dans un monde, mais toutefois j’ai trouvé qu’on retombait quand même régulièrement sur ce rejet de l’autre, ce qui donne cette impression de tourner un peu en rond très vite.

Néanmoins, et même si je ne partage pas l’idée qui veut faire croire que dans la solitude on est malheureux ou qu’on est rien, les réflexions qu’il amène à repenser à son amour pour sa femme sont intéressantes à lire, tout comme le déni de Vincent à ne pas vouloir voir que sa solitude lui pèse, que la sécurité, le côté guide de Karen, lui manque et le fragilise. On a vraiment l’image d’un homme qui se noie sans s’en rendre réellement compte, et ça c’est plutôt sympathique.

Cela étant, dire que tout ce livre est prévisible serait faux de ma part. Effectivement, la fin apporte une petite surprise non désagréable pour le lecteur, un peu moins agréable pour Vincent par contre. Bon, c’est très rapide, mais finalement c’est ce détail qui laisse cette impression que le livre raconte un truc et n’est pas qu’un simple état des lieux sans intérêt du personnage principal.

En résumé, je ressors de cette lecture mi-figue mi-raisin, je ne regrette pas d’avoir découvert ce livre, mais je ne le juge pas indispensable. Ma note 6,5/10.

Lecteurs.com et les éditions Le Dilettante.

3 avril 2019

"Les mal-aimés" de Jean-Christophe Tixier

Les mal-aimés de Jean-Christophe Tixier

les mal-aimés Tixier

Résumé :

1884, aux confins des Cévennes. Une maison d’éducation surveillée ferme ses portes et des adolescents décharnés quittent le lieu sous le regard des paysans qui furent leurs geôliers.

Quand, dix-sept ans plus tard, sur cette terre reculée et oubliée de tous, une succession d’événements étranges se produit, chacun se met d’abord à soupçonner son voisin. On s’accuse mutuellement du troupeau de chèvres décimé par la maladie, des meules de foin en feu, des morts qui bientôt s’égrènent… Jusqu’à cette rumeur, qui se répand comme une traînée de poudre : « ce sont les enfants qui reviennent. » Comme si le bâtiment tant redouté continuait de hanter les mémoires.

Porté par une écriture hypnotique, le roman de Jean-Christophe Tixier, portrait implacable d’une communauté rongée par les non-dits, donne à voir plus qu’il ne raconte l’horreur des bagnes pour enfants qui furent autant de taches de honte dans l’Histoire du XXe siècle.

Mon avis :

Ils pensaient qu’étouffer les faits les feraient tomber dans l’oubli, et que ne pas déranger les morts éloignerait leur furie, les Erinyes. Une série d’évènement leur donnera tort. La vengeance divine, à moins que ça soit celle du diable, frappe et frappe fort. C’est le moment pour chacun de se débattre avec sa conscience…

Dans ce village des Cévennes la vie n’est pas facile tous les jours. Il faut panser les bêtes, rentrer le foin, réparer le toit, anticiper toutes mauvaises fortunes pour que demain ne soit pas pire qu’aujourd’hui. Quelques mains, surtout si ces mains ne sont pas coûteuses, ne sont dans ce contexte pas de refus… Dans les bagnes et l’assistance, les villageois vont alors se servir en échange de quelques piécettes.
Mais un jour, devant la maltraitance, le bagne ferme. Mais les petits démons sont toujours là. Surtout dans les consciences, où les langues se délient et s’accusent, cherchent des explications aux malheurs qui les frappent.  

Cette honte, cette peur, cette avarice, cette culpabilité, cette envie de sang, l’auteur a très bien su les retranscrire. Par petite touche, petit évènement, on voit que ça grignote les cœurs et les esprits, et que la population est prête à accuser n’importe qui, à faire n’importe quoi, pour taire leur peur et calmer les esprits, ou au contraire les échauffer.
En parallèle cependant, on découvre aussi que certains habitants voudraient bien ressusciter les démons et même le bagne, comme cette sainte âme qui chante la messe tous les dimanches. C’est qu’il y a beaucoup à y gagner...

Toutefois, l’auteur ne fait pas qu’aborder les êtres et les sentiments qui s'agitent autour de ces enfants. A travers cette histoire de bagne et d’enfant, c’est aussi une parcelle des mentalités de l’époque que Jean-Christophe Tixier aborde. A savoir la déchristianisation de la France à la veille de la loi de 1905 et qui est bien plus prononcée en ville que dans les campagnes, bien qu’elle ne soit pas absente de ces dernières étant donné que l’on craint davantage l’œuvre du Diable que celle de Dieu qui semble une entité plus lointaine et absente.
Sur ce sujet, j’ai adoré d’ailleurs les réflexions sur l’inexistence de Dieu du médecin qui représente la ville, et celles de l'ambitieux curé de campagne qui voit dans cette loi le malheur annoncé des êtres et du pays. Enfin, surtout la perte de son pouvoir sur les âmes si vites submergées et qui ont besoin d'un guide spirituel. L’auteur cherche-t-il à dénoncer l’ignorance et la peur si bien entretenues par les curés afin de mieux gouverner ? Je ne sais, mais tel est mon ressenti.

Quoi qu'il en soit, j'ai adoré les réflexions et les mentalités représentées dans ce bouquin si parlant avec des personnages si peu bavards. Outre cette description des caractères et les réflexions, j'ai apprécié aussi le fait que l'auteur aborde un sujet si peu abordé en littérature : les bagnes d'enfant. Toutefois, je n'en fais pas un coup de coeur malgré le fait que ça soit un livre que j'ai aimé lire. L'écriture ne m'a en effet, pas tant emballée que ça. Mais ça se lit très bien quand même.

Quant à vous messieurs, dames, si la cruauté du sujet vous inquiète et vous fait repousser l'envie de lire ce livre, n'ayez crainte ce n'est pas un roman difficile à lire. Notamment grâce au fait que l'auteur impose plus ou moins un voile de pudeur sur les sévisses. Rendant de ce fait la lecture moins appuyée sur la maltraitance.

Albin Michel.

 

29 mars 2019

"Le hussard noir" de Marie Pellan & William Lafleur

Le hussard noir de Marie Pellan & William Lafleur

Source: Externe

Résumé :

Thomas Debord est un professeur de lettres en ZEP passionné par son métier. Lassé par un gouvernement qui détricote l’éducation, frustré par l’absence de prise en compte des manifestations et grèves successives, il décide de s’engager dans une voie plus violente.
Un matin, il prend une de ses classes en otage, afin de mettre en lumière des dysfonctionnements qui n’intéressent habituellement que de très loin les médias. Pris au piège de l’emballement médiatique et de la cacophonie des réseaux sociaux, enfermé avec ses élèves, Thomas Debord va tenter de faire entendre sa voix.
Un roman ancré dans le réel, construit comme un thriller et qui nous plonge dans la multitude des formes de discours auxquels nous sommes confrontés à chaque drame.

Mon avis :

C’est l’histoire d’un mec qui prend une classe en otage. C’est l’histoire d’un prof qui pète une durite contre le système et tente de faire entendre sa voix dans la masse. C’est une voix qui s’élève contre la médiocrité ambiante, l’éducation nationale, le monde politique, le consumérisme, le sensationnalisme, les querelles d’intérêt et j’en passe.

J’ai lu ce livre quasiment d’une traite. Non parce qu’il est bien écrit, ça souffre un peu de redite et il n’est pas écrit de manière recherchée, mais parce que les échanges autour d’un grand évènement étaient exposés de manière réelle, où les suppositions, les accusations, les mono-dialogues, les faux débats, vont bon train et n’avancent à rien ; chacun restant sur ses positions.
Etait bien abordé aussi, le métier journalistique et ses erreurs. Tant dans les discours que dans la manière de faire, que ça soit dans la recherche de l’image, du témoignage qui tue, ou encore la déformation et répétition des faits.
Outre ceci, j’avoue que je partage aussi quelques idées de ce prof malheureux. Le sensationnalisme, le consumérisme, le clash, le conformisme, l’abandon des profs (que je ne suis pas), ont en effet de quoi débecter tout être pensant. Et j’ai trouvé d’ailleurs ces sujets plutôt bien abordés quoi que de manière rapide.

Néanmoins, je ne marche pas entièrement avec ce livre parce que niveau facilité, ça se pose là. En effet ce livre, c’est un fait divers retranscrit sans analyse, qui se contente de répéter ce qu’on entend ou lit à longueur de journée dans des journaux en pilotage automatique. Et là en l’occurrence dans les journaux de gauche et du monde des bisounours surtout. Ca va accuser le manque de moyen dans l’éducation nationale oubliant que les élèves et les parents sont autant responsables de l’éducation ; ça va jouer sur le pathos avec la victimisation des jeunes de banlieues et le manque de mixité sociale ; ça va jouer encore sur la fachosphère parce que comprendre ces gens ce n’est visiblement pas possible ; ça va jouer sur les brimades qui feraient plus de mal que de bien ; ça va jouer sur bien d’autres choses encore, mais en résumé, ça joue beaucoup sur des clichés et tout ça ne va guère plus loin dans le raisonnement. Ca raconte et c’est tout. Et c'est ce que je lui repproche. Après je ne dis pas qu’il n’y a pas des ouvertures vers le camp d’en face, mais c’est tellement timide ou tellement pour leur rentrer dans le lard, que ça devient comique.
Enfin, autre problème et pour bien faire cliché, on parle d’un évènement dans une ZEP (passe encore même si ailleurs il y a des problèmes) en banlieue parisienne, parce que visiblement il n’y a qu’en banlieue et à Paris qu’il y a des problèmes. La France périphérique, des campagnes, connaissent pas. Elle est absente des débats et donc de l’actualité. 

En clair. J’ai apprécié ce livre pour son exposition du fait divers, mais je l’aurais plus apprécié s’il avait été un peu plus loin dans le raisonnement, s’il ne s’était pas que contenté d’accuser et de victimiser, s’il avait un peu mieux réparti les rôles, s’il avait donné raison et tort à tout le monde. Les auteurs ont bien décrit le fonctionnement du buzz, mis en avant l’immobilisme politique, les débats stériles, les sempiternelles discours, mais ça ne va pas plus loin, hélas... Et j'ai connu des romans qui vont plus loin dans les choses. Des livres comme ça vous en avez 10 par jours en réalité. Sur ce sujet ou sur un autre. A la télé ou sur internet. Ma note 2,5/5. Il est à lire, mais à part deux trois petites choses pas mal du tout, il ne faut pas s'attendre à grand chose.

Editions Flammarion.

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